Mao Zedong : Terrible dictateur responsable de la mort de + de 40 millions de Chinois.
C’est la vision que nous avons, en France, de cet homme d’État et chef militaire.
Mais en Chine, Mao Zedong est admiré par une grande partie de la population.
Un jour, alors que je visitais la Place Tiananmen, j’ai dit à mon amie chinoise : « 我不喜欢毛泽东 » (« Je n’aime pas Mao Zedong »). Trois locaux m’ont jeté un regard noir, et mon amie m’a conseillée de ne pas le dire trop fort !
Alors, pourquoi cet ancien dirigeant est-il si admiré en Chine ? Qui est réellement Mao Zedong ? Découvrez la biographie du Fondateur de la République Populaire de Chine.
Bonne lecture !
Sommaire
La jeunesse de Mao Zedong
La découverte des pensées révolutionnaires
Mao Zedong (毛泽东 Máo Zédōng) est né le 26 décembre 1893 à Shaoshan, dans la province du Hunan.
Dans quel contexte a grandi le petit Mao ?
La dynastie Qing ne parvient pas à moderniser le pays ni à faire respecter l’indépendance nationale.
Dès son plus jeune âge, Mao est un lecteur vorace. Il adore en particulier les romans historiques avec des héros militaires.
À l’âge de 13 ans, il est forcé de travailler dans la ferme familiale. Il finit par se rebeller contre l’autorité paternelle et poursuit ses études primaires à Changsha, la capitale du Hunan.
C’est à cette époque qu’il découvre la pensée de révolutionnaires et de réformateurs nationalistes tels que Liang Qichao ou Sun Yat-sen.
L’expérience militaire
En octobre 1911, une révolte contre la dynastie Qing éclate.
Cette insurrection, menée par le nationaliste Sun Yat-sen, a pour but de mettre fin au régime impérial.
Au printemps 1912, la République de Chine (中华民国 zhōnghuá mínguó) est proclamée et Mao revient à Changsha pour terminer ses études.
C’est la fin des dynasties chinoises !
Formation politique
C’est lors de ses études secondaires que Mao va s’intéresser de plus en plus à la politique.
En 1917, il rejoint une organisation étudiante militante, la Société d’étude du nouveau peuple.
Une fois diplômé, Mao part à Pékin à l’automne 1918. Il fait alors la rencontre de Chen Duxiu et Li Dazhao, les futurs fondateurs du Parti communiste chinois.
De retour à Changsha en 1920, il fonde une section des Jeunesses socialistes et publie son premier article marxiste.
Il est alors directeur d’école primaire (😶), puis gérant d’une librairie.
En 1921, Mao Zedong participe à la création du Parti communiste chinois (PCC) à Shanghai.
L’ascension de Mao et du Parti communiste chinois
Avant d’aller plus loin, voici une petite leçon de vocabulaire !
Les partis communiste et nationaliste chinois se lisent respectivement :
- 中国共产党 (Zhōngguó Gòngchǎndǎng).
- 中国国民党 (Zhōngguó Guómíndǎng).
Dix ans à peine après sa fondation, la République de Chine commence à rencontrer des difficultés.
Les seigneurs de guerre se sont emparés des provinces du Nord.
Pour vaincre cet ennemi, Sun Yat-sen suggère une alliance entre les partis communiste et nationaliste (Guomindang).
Mao est chargé d’organiser les troupes militaires à Hunan, puis à Jiangxi. Les communistes vont mener plusieurs offensives, qui se soldent par un échec.
Forcés d’abandonner le Jiangxi, ils vont commencer la Longue Marche, une traversée d’un an sur 12 000 km qui les mènera dans le Shanxi.
Cet événement reste l’un des symboles les plus importants de l’histoire de la lutte communiste chinoise !
En 1935, il devient chef de parti.
De la Longue Marche à la victoire communiste
En 1937, le Japon envahit la Chine.
Le parti communiste et le Guomindang passent un accord pour faire front commun contre l’ennemi nippon.
La guerre sino-japonaise permet aux communistes d’asseoir leur autorité et de mobiliser les populations locales.
Après la Seconde Guerre mondiale, la guerre civile entre les deux partis reprend.
Cette fois-ci, ce sont les communistes qui l’emportent.
J’ai d’ailleurs écrit un article complet pour vous expliquer en détail l’histoire du conflit entre la Chine et Taïwan.
Aux yeux des Chinois, le parti communiste de Mao incarne l’indépendance nationale et l’espoir d’une révolution sociale.
Le président Mao et la République populaire de Chine
Reconstruction de la Chine
Le président Mao, surnommé le « Grand Timonier », s’attaque à la reconstruction politique, sociale et économique du pays avec l’aide de l’URSS.
Le développement économique se base sur le modèle social soviétique :
- abolition de la propriété privée;
- création de coopératives agricoles;
- dictature du parti unique.
Cette politique semble fonctionner, puisqu’en quelques années, la Chine accroît considérablement sa production.
Peu à peu, le pays redore son image internationale.
Remise en question du maoïsme
L’année 1956 marque un tournant dans la vie de Mao.
En février, l’Union soviétique condamne le culte de la personnalité de Staline. Le Grand Timonier craint que cette attaque n’ait des répercussions sur son propre pouvoir en Chine.
Ses pires craintes sont confirmées : Liu Shaoqi, le numéro deux du parti, et Deng Xiaoping, son secrétaire général, fustigent le culte de la personnalité et encouragent la direction collective.
Durant les dix prochaines années, le fondateur de la République ne cessera de lutter pour se maintenir au pouvoir.
Ainsi, on peut considérer ses initiatives prises de 1957 à 1966 comme des tactiques pour rester à la tête du pays.
La campagne des Cent Fleurs
Le but est de permettre au peuple chinois, dont les intellectuels, de critiquer la ligne politique du PCC.
Il choisit comme slogan une référence à Zhuangzi, un ouvrage taoïste : « Que cent fleurs s’épanouissent, que cent écoles rivalisent ». 🌸
Le mouvement est allé trop loin, et la tolérance du président a ses limites.
Mao reprend alors ses « cent fleurs » en distinguant les « fleurs parfumées » et les « fleurs vénéneuses ».
Les contestataires sont alors durement réprimés : intellectuels, élites, membres d’autres partis, près d’un demi-million de personnes sont envoyées dans des camps de rééducation…
Mao aurait affirmé que cette campagne était un stratagème délibéré pour « attirer les serpents hors de leur grotte 🐍» (autrement dit : amener les dissidents au grand jour !).
Le Grand Bond en avant
Le Grand Bond en avant est considéré comme l’une des plus grandes erreurs du président Mao.
Pour cause : ce programme a entraîné la mort de millions de personnes ☠️… Je vous explique !
Face à ce défi, le président décide de lancer en 1957 un projet économique pharaonique : le Grand Bond en avant (大跃进 dà yuè jìn).
Ce projet a pour objectif :
- d’adapter le socialisme soviétique à la Chine;
- d’augmenter la productivité de l’industrie et de l’agriculture;
- d’accélérer la collectivisation des terres.
Ces entités regroupent environ 5 000 familles et sont censées être auto-suffisantes au niveau administratif, industriel, agricole, etc.
Le programme des réformes implique l’intensification du rythme de travail. Surexploités, les paysans produisent de l’acier médiocre et négligent leurs travaux agricoles.
En à peine 3 ans, le pays est confronté à une grande famine, qui entraîna la mort de millions de personnes.
La Révolution culturelle
Une révolution du prolétariat
Dans les années 60, le parti communiste est divisé en deux camps : les réformateurs modérés (comme Liu Shaoqi et Deng Xiaoping) et les radicaux (comme Mao Zedong et Lin Biao).
Après l’échec du « Grand Bond en avant », Mao se retire de la présidence et cède la place à Liu Shaoqi.
Mais l’ancien dirigeant ne veut pas en rester là !
En 1966, Mao Zedong lance sa révolution culturelle (文化大革命 wénhuà dàgémìng) dans le but de reprendre le pouvoir.
L’objectif officiel est de purger le pays de la corruption, du capitalisme et des vieilles traditions chinoises.
La Révolution culturelle se veut une nouvelle phase de la lutte des classes.
Il s’agit d’éliminer tous ceux qui retardent « l’édification du socialisme ».
Le culte de la personnalité
Pour mener à bien son projet, le Grand Timonier va s’appuyer sur l’aide de la jeunesse chinoise, une génération déçue par la politique menée par Liu Shaoqi.
Ces jeunes, appelés les gardes rouges, craignent un retour du capitalisme et vouent un véritable culte à Mao.
Les pensées du dirigeant, résumées dans le Petit Livre rouge 📕, sont diffusées et commentées dans tout le pays.
D’ailleurs, c’est le deuxième livre le plus vendu au monde, après la Bible ! Son visage se trouve partout sur des affiches : il est vénéré comme un dieu. Les idées maoïstes arrivent même à séduire la jeunesse européenne de 1968…
Avec l’aide des gardes rouges, Mao parvient à chasser les intellectuels de la ville et à éliminer ses principaux rivaux du PCC. Des milliers de personnes sont alors envoyées à la campagne se faire rééduquer par le travail manuel.
État totalitaire et chaos
L’ambition politique de Mao se heurte de nouveau aux réalités du terrain.
La révolution s’accompagne de violences massives de la part des gardes rouges.
Face à la tournure des événements, Mao fait intervenir l’armée pour restaurer l’ordre. Les chefs des gardes rouges sont arrêtés et envoyés à la campagne.
Le bilan de ce mouvement est tragique.
Responsable de la mort de 4 millions de personnes supplémentaires, Mao quitte la vie politique au début des années 70.
L’héritage du Grand Timonier
Atteint de la maladie de Parkinson, Mao Zedong meurt le 9 septembre 1976 à l’âge de 82 ans.
Malgré les répercussions désastreuses du « Grand Bond » et de la Révolution culturelle, l’image du Grand Timonier reste celle du vainqueur.
Dans l’imaginaire collectif, Mao Zedong représente le symbole de la révolution chinoise. Pour beaucoup, ce dirigeant a contribué à la construction d’une Chine indépendante et moderne.
Si vous passez par Pékin lors d’un voyage en Chine, vous pourrez voir le mausolée de Mao Zedong sur la place Tian’anmen.
Un énorme portrait de 8 x 4 m est d’ailleurs installé sur la porte Tian’anmen. De nombreux vendeurs de rue vous proposeront des babioles à son effigie !
De lui, les Chinois retiendront la folie des grandeurs, la vision d’une justice sociale, l’héritage du parti unique et l’élaboration d’un communisme en Asie.
Saviez-vous que Mao Zedong était toujours admiré en Chine ?
Quel est le fait qui vous marque le plus dans son histoire ?
N’hésitez pas à partager votre avis dans les commentaires.
Et si vous aimez l’histoire de Chine, découvrez aussi notre reportage sur la révolution culturelle :
Merci, bonne synthèse, en effet grosse longévité, personnage important de la chine moderne, avec du bons et du mauvais, enfin bon comme il est toujours d’actualité, il faudrait taire (à tord) le mauvais…
Sous Mao Zedong, l’espérance de vie à doublé, de 35-40 ans à 65 ans.
Merci c’est passionnant
Je vous conseille le documentaire « Leys, l’homme qui a deshabiller Mao » sur Public Senat.
Le risque d’une grande synthèse est de survoler au point de ne plus donner à distinguer que les grandes lignes. Pour le personnage de Mao, comme pour tous les grands acteurs politiques il faut souvent rentrer dans les détails pour saisir la vérité du personnage, pour apprécier sa rouerie politique, son sens du pouvoir, du jeu des forces ainsi que sa rouerie morale qui l’aura fait tenir une ligne de façon aussi déterminée et entretenir une ambition jamais démentie. Et ceci d’autant plus qu’il y aura nombre de récits pour célébrer le leader et ajouter des couches de vernis qui poliront le récit officiel.
Il n’y a rien de bon à tirer de Mao, cet être amoral. Il a manifesté dès sa jeunesse un orgueil démesuré propre à faire de lui ce broyeur de millions à venir. Qu’il s’agisse de son rapport aux femmes, de ses perversion sexuelles comme de la manipulation qu’il exerça sur elles, de son refus de l’hygiène; mais aussi son rapport à la politique et les mensonges éhontés qu’il accumula tout au long de sa vie pour parvenir à ses fins, Mao n’a jamais pensé qu’à lui, à ses plaisirs, et au pouvoir qu’il estimait lui revenir de droit par aveuglement sur ses capacités intellectuelles et créatrices. Il a toujours agi avec le plus parfait cynisme et contrairement à ce qui est souvent lu, avant le culte de la personnalité, il n’enflamma pas par ses discours ennuyeux et peu profonds. Il subit plusieurs vexations intellectuelles au début de son entrée dans le monde adulte, les premiers leaders se méfiaient de lui, de sa sincérité marxiste d’autant qu’il peina à recruter des adhérents. Il fut ainsi mis à l’écart de la fondation du P.C chinois, mais pas dans la version historique officielle du Parti-Etat. Mao a toujours été souffrant lorsque cela lui convenait et manqua également toujours de courage physique (se faisant même porter durant la Longue Marche) et d’ailleurs les troupes communistes n’ont pratiquement pas combattu les Japonais. On peut lire certains de ses poèmes pour apprécier sa médiocrité littéraire et sa fadeur (il a repris maints clichés), afin de ne pas seulement s’étonner devant ses projets politiques (souvent résumés par une formule censée convoquer la parole performative d’un dieu, et même si l’aspect doctrinaire et tentaculaire du Parti et la veulerie des autres dirigeants ont favorisé ces abominations). Car ce ne sont pas d’erreurs qu’il faut parler, mais de fautes, si l’individu avait pu manifester un réel sens moral. Mao n’a pensé qu’à s’établir sur un nouvel ordre, dans une nouvelle Chine, en ayant mis à bas des siècles de civilisation. Il fallait au moins un démon pour espérer faire disparaître totalement l’âme d’un pays. 🙂
Lire les essentiels Simon Leys, Jon Halliday, Jung Chang, Dubois De Prisque
Très juste Mao est un être abo-
minable. Bon résumé de sa personnalité. Lire les Essais sur la Chine de Simon Leys.
Sujet sensible, s’il en est, en Chine. L’équipe actuelle au pouvoir et son président, appréciés par une vaste majorité des Chinois pour ses résultats incontestables, souhaitent maintenir l’unité du pays en leur apportant un confort matériel croissant et en le concentrant sur les défis à venir, quitte à leur faire progressivement oublier le passé douloureux de la période Mao. Le véritable artisan du miracle chinois est Deng Xiaoping, un peu passé sous silence en Chine.
Ne pas oublier dans le passif de Mao, la destruction d’une grande partie des objets artistiques de la Chine ancienne, disparus a jamais et dont une petite partie a été heureusement sauvée par Tchang Kaï-chek a Taipeh