Quand on commence à apprendre le chinois, on pense souvent à ces caractères carrés, pleins de traits, qui ont l’air compliqués mais qui cachent une vraie logique.
On apprend les hanzi, le pinyin, les tons. Et on découvre peu à peu un univers millénaire.
Mais ce que la plupart des étudiants ne savent pas, c’est qu’il existe une autre écriture. Un système à part. Une écriture secrète… que les hommes ne comprenaient pas.
Elle s’appelle Nǚshū (女书). Littéralement : “écriture des femmes”.
Pendant des siècles, elle a été transmise en cachette entre mères, sœurs et amies.
Elle servait à se confier, à s’encourager, à raconter sa vie dans une société où les femmes n’avaient pas le droit d’apprendre à lire ou à écrire.
Aujourd’hui, elle a presque disparu. Mais elle refait surface, doucement. Et elle pourrait bien te donner une nouvelle envie d’apprendre le chinois.
Dans ce nouveau guide, tu vas découvrir à quoi elle ressemble et surtout, comprendre pourquoi elle a existé !
C’est parti !
Sommaire
Naissance du Nǚshū
Le Nǚshū est né dans un coin reculé du sud de la Chine, dans le comté de Jiangyong, province du Hunan.
Pas vraiment un grand centre urbain. Plutôt des villages, entourés de rizières et de montagnes.
C’est là que des femmes ont inventé leur propre façon d’écrire. Pas pour faire joli. Pas pour impressionner. Juste pour pouvoir s’exprimer.
Parce que, pendant des siècles, les femmes chinoises n’avaient pas accès à l’éducation.
Elles n’apprenaient pas à lire les caractères chinois classiques, réservés aux hommes. Leur rôle, c’était de rester à la maison, d’obéir et de se taire.
Mais certaines ont trouvé une autre voie.
Elles ont créé le Nǚshū. Une écriture secrète, transmise de bouche à oreille, ou cousue sur des tissus, ou encore chantée dans des chansons.
Elles s’écrivaient des lettres entre amies, des poèmes, des journaux intimes. Elles racontaient leurs peines, leurs espoirs, leurs rêves. En douce.
C’était leur manière de dire : “Moi aussi, j’ai des choses à dire.”
À quoi ressemble le Nǚshū ?
Le Nǚshū n’a rien à voir avec les caractères chinois que tu connais.
Il ne ressemble pas aux hanzi, ni au pinyin. C’est une écriture totalement à part.
Visuellement, elle est fine, allongée, presque élégante.
Chaque signe est tracé comme une sorte de petit losange étiré, avec des courbes douces.
Certains disent que ça ressemble à de la broderie. Et ce n’est pas un hasard : beaucoup de textes en Nǚshū étaient justement cousus sur des tissus.
Côté système, le Nǚshū n’est pas logographique comme le chinois classique.
Il est syllabique. En gros, chaque symbole correspond à une syllabe.
Et comme le dialecte local (le xiānghuà, une variante du chinois parlé dans la région) compte environ 600 syllabes, le Nǚshū compte… environ 600 signes. Pas plus.
C’est beaucoup plus simple que les milliers de hanzi qu’on apprend aujourd’hui. Mais attention, ça ne veut pas dire que c’était facile à maîtriser.
Cette écriture n’était pas faite pour les examens impériaux. Elle était faite pour parler au cœur. Et elle avait son propre rythme, son propre style.
Un peu comme une langue intime. Un secret entre femmes.
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Un outil de solidarité féminine
Le Nǚshū, ce n’était pas juste une écriture. C’était un lien invisible entre femmes.
Un moyen de se soutenir dans une vie souvent marquée par le silence, la séparation, et les règles strictes de la société.
Les femmes s’écrivaient des lettres, des poèmes, des chants.
Elles les appelaient parfois les “écrits du cœur”.
Et souvent, ces messages étaient envoyés à des amies très proches, un peu comme des sœurs de cœur.
L’un des exemples les plus touchants, c’est celui des “lettres du troisième jour”.
Quand une jeune femme se mariait, elle quittait son village pour aller vivre chez son mari. Et ce n’était pas une petite distance : parfois, elle ne revoyait plus jamais sa famille.
Trois jours après le mariage, ses amies lui envoyaient un petit carnet écrit en Nǚshū.
À l’intérieur : des souvenirs, des conseils, des mots tendres, parfois des larmes. Le tout en poèmes ou en chants, cousus ou écrits à la main.
C’était une manière de dire :“Tu n’es pas seule.”
Dans un monde où elles avaient peu de pouvoir, ces femmes ont utilisé l’écriture pour créer un espace à elles.
Un monde parallèle, discret, mais solide.
Une écriture en voie de disparition… mais redécouverte
Pendant des siècles, le Nǚshū est resté bien vivant, transmis de mère en fille, sans jamais sortir des villages du Hunan.
Mais au XXe siècle, tout a changé.
Les guerres, la révolution culturelle, l’arrivée de l’école obligatoire, la modernisation rapide de la Chine… Peu à peu, les jeunes générations ont abandonné le Nǚshū.
Elles parlaient chinois standard, écrivaient en hanzi. Et surtout, elles n’avaient plus besoin d’une écriture secrète pour communiquer.
Dans les années 1990, il ne restait plus que quelques vieilles dames capables de lire et d’écrire en Nǚshū.
Certaines étaient même surnommées les “dernières femmes du Nǚshū”.
On a failli perdre cette écriture unique à jamais.
Heureusement, des chercheurs chinois et étrangers ont commencé à s’y intéresser. Ils ont enregistré, photographié, étudié tout ce qu’ils pouvaient sauver.
Aujourd’hui, le Nǚshū connaît une petite renaissance : musées, festivals, cours pour apprendre à l’écrire… même des artistes modernes s’en inspirent !
Ce n’est plus une langue secrète. C’est devenu un patrimoine culturel, reconnu et protégé.
Et même si très peu de gens savent encore vraiment l’écrire, l’esprit du Nǚshū, lui, continue de vivre.
Comment le 女书 peut t’aider dans ton apprentissage
Tu te demandes peut-être : “Ok, c’est touchant, mais en quoi ça m’aide à progresser en chinois ?”
Bonne question. Et tu vas voir que ça peut vraiment enrichir ton apprentissage.
D’abord, le Nǚshū te montre qu’il n’y a pas qu’une seule façon d’écrire le chinois.
Il y a les caractères officiels, bien sûr, mais aussi des formes alternatives, locales, parfois inventées, parfois oubliées.
Et rien que ça, ça t’ouvre l’esprit.
Ensuite, le Nǚshū te fait sentir que la langue, ce n’est pas qu’une affaire de règles ou de dictionnaires.
C’est aussi une affaire d’émotions, de relations humaines, de résistance.
Ces femmes n’avaient pas de manuels. Pas d’apps. Pas de prof.
Et pourtant, elles ont trouvé un moyen de s’exprimer. De se comprendre.
C’est une belle leçon de créativité linguistique, non ?
Enfin, découvrir le Nǚshū, c’est comme ajouter une couche de profondeur à ta motivation.
Quand tu écris ton premier caractère en chinois, tu t’inscris quelque part dans cette longue histoire.
Pas seulement l’histoire impériale des lettrés. Mais aussi celle, plus discrète, des femmes qui écrivaient en secret, juste pour ne pas disparaître.
Petit message perso
Le Nǚshū, c’est une écriture fine. Discrète. Presque invisible. Et pourtant, elle porte quelque chose de puissant.
Ce n’est pas juste une curiosité culturelle. C’est un cri doux mais ferme. Une preuve que, même dans le silence, même dans l’ombre, les mots trouvent toujours un chemin.
Ces femmes n’ont jamais appris les hanzi. Elles n’ont jamais suivi de cours de chinois.
Mais elles ont appris à dire “je t’aime”, “je souffre”, “je suis là” à leur manière.
En inventant leur propre langue. En l’offrant à leurs sœurs, comme un acte de tendresse et de résistance.
Et toi, aujourd’hui, tu as une chance incroyable : tu peux apprendre le chinois en pleine lumière.
Tu peux t’approprier cette langue, pas pour passer un test, mais pour te connecter. Avec une culture, avec une histoire, avec des gens.
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